• Français
  • English

article d’Olivier Gilg publié dans Science

Etiquette(s) : articles et presse

 

lemmingPourquoi certains oiseaux migrent t-ils chaque année vers les régions hostiles et lointaines de l’Arctique ?

Les limicoles arctiques (bécasseaux, pluviers, grands gravelots, tournepierres, etc.), dont de nombreuses espèces migrent à travers la France, peuvent parcourir plusieurs dizaines de milliers de kilomètres chaque année le long de voies de migrations intercontinentales connectant leurs zones d’hivernage méridionales et leurs zones de reproduction polaires.

 

Olivier Gilg & Nigel G. Yoccoz, 2010. Explaining bird migration. Science, 327 (5963) : 276-277

 

bécasseau sanderling

De nombreuses études ont expliqué par le passé comment ces oiseaux surmontaient les problèmes physiologiques et d’orientation liés à de telles migrations, mais les véritables raisons qui les incitent à migrer restaient pour l’instant obscures. Une étude récente (McKinnon et al., Science 327, 2010), menée dans l’Arctique canadien sur un transect latitudinal de près de 3000 km, vient de mettre en évidence une corrélation négative entre la latitude et le taux de prédation des nids dans la Toundra : plus ces limicoles nichent au nord, moins ils risquent de voir leurs nids prédatés. Pour ces oiseaux, le coût élevé d’une longue migration (besoins énergétiques et risques de mortalité accrus) semble ainsi être compensé par un taux de reproduction plus élevé dans le Nord. Si la pression de prédation est bien le facteur déterminant de la migration de certains oiseaux de l’Arctique, elle façonnerait donc aussi indirectement la biodiversité des écosystèmes terrestres de cette région.

Cette hypothèse, négligée jusqu’à présent par les biogéographes, est confortée par l’étude comparée des aires distribution d’autres espèces arctiques. La répartition des lemmings arctiques, rongeurs formant habituellement l’essentiel des proies des prédateurs terrestres, est exemplaire à cet égard. Au Svalbard et dans le sud et l’ouest du Groenland par exemple, les lemmings sont absents et la forte pression de prédation exercée sur les oiseaux, notamment par le renard polaire, ne permet qu’aux espèces les moins sensibles à la prédation (grand gravelot et bécasseau violet par exemple) de se reproduire. Au contraire, dans le nord du Canada, le nord et l’est du Groenland, la présence des lemmings engendre une réduction de la pression de prédation sur les oiseaux, permettant également la nidification d’espèces apparemment plus sensibles aux prédateurs (Bécasseaux sanderling et maubèche par exemple).

kc_data:
a:8:{i:0;s:0:"";s:4:"mode";s:0:"";s:3:"css";s:0:"";s:9:"max_width";s:0:"";s:7:"classes";s:0:"";s:9:"thumbnail";s:0:"";s:9:"collapsed";s:0:"";s:9:"optimized";s:0:"";}
kc_raw_content:

 

lemmingPourquoi certains oiseaux migrent t-ils chaque année vers les régions hostiles et lointaines de l’Arctique ?

Les limicoles arctiques (bécasseaux, pluviers, grands gravelots, tournepierres, etc.), dont de nombreuses espèces migrent à travers la France, peuvent parcourir plusieurs dizaines de milliers de kilomètres chaque année le long de voies de migrations intercontinentales connectant leurs zones d’hivernage méridionales et leurs zones de reproduction polaires.

 

Olivier Gilg & Nigel G. Yoccoz, 2010. Explaining bird migration. Science, 327 (5963) : 276-277

bécasseau sanderling

De nombreuses études ont expliqué par le passé comment ces oiseaux surmontaient les problèmes physiologiques et d’orientation liés à de telles migrations, mais les véritables raisons qui les incitent à migrer restaient pour l’instant obscures. Une étude récente (McKinnon et al., Science 327, 2010), menée dans l’Arctique canadien sur un transect latitudinal de près de 3000 km, vient de mettre en évidence une corrélation négative entre la latitude et le taux de prédation des nids dans la Toundra : plus ces limicoles nichent au nord, moins ils risquent de voir leurs nids prédatés. Pour ces oiseaux, le coût élevé d’une longue migration (besoins énergétiques et risques de mortalité accrus) semble ainsi être compensé par un taux de reproduction plus élevé dans le Nord. Si la pression de prédation est bien le facteur déterminant de la migration de certains oiseaux de l’Arctique, elle façonnerait donc aussi indirectement la biodiversité des écosystèmes terrestres de cette région.


Cette hypothèse, négligée jusqu’à présent par les biogéographes, est confortée par l’étude comparée des aires distribution d’autres espèces arctiques. La répartition des lemmings arctiques, rongeurs formant habituellement l’essentiel des proies des prédateurs terrestres, est exemplaire à cet égard. Au Svalbard et dans le sud et l’ouest du Groenland par exemple, les lemmings sont absents et la forte pression de prédation exercée sur les oiseaux, notamment par le renard polaire, ne permet qu’aux espèces les moins sensibles à la prédation (grand gravelot et bécasseau violet par exemple) de se reproduire. Au contraire, dans le nord du Canada, le nord et l’est du Groenland, la présence des lemmings engendre une réduction de la pression de prédation sur les oiseaux, permettant également la nidification d’espèces apparemment plus sensibles aux prédateurs (Bécasseaux sanderling et maubèche par exemple).

Log In

Create an account