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article d’Alexandre Pohl publié dans Nature Communications

La Terre, il y a 520 millions d’années, lorsque la vie animale s’est diversifiée dans les océans

La vie marine complexe, comprenant les ancêtres de la plupart des groupes d’animaux que l’on connaît aujourd’hui, s’est diversifiée dans les océans il y a environ 520 millions d’années, au cours de l’ « Explosion Cambrienne ». Des chercheurs belges, français, anglais et américains1 ont apporté un éclairage nouveau sur la position des continents et le climat de la Terre à cette époque critique pour l’évolution de la vie. Les résultats de l’étude sont publiés dans la revue Nature Communications.

 

La plupart des groupes d’animaux qui peuplent notre planète aujourd’hui sont apparus durant le Cambrien inférieur (il y a environ 520 millions d’années), marquant l’avènement de la biosphère complexe que l’on connaît aujourd’hui. Malgré l’importance de cette période pour l’évolution de la vie, la cadre dans lequel s’est produite l’Explosion Cambrienne, y-compris la configuration des continents et le climat de la Terre, reste mal contraint. De telles incertitudes persistent car la plupart des techniques utilisées pour reconstruire le climat et la position des continents sont difficiles à appliquer au passé si lointain. En effet, au fur et à mesure que l’on remonte dans le passé, la quantité de sédiments préservés diminue et les propriétés physico-chimiques primaires des roches sont de plus en plus altérées par les processus géologiques.

Figure 1 : Configuration des continents et températures océaniques au cours du Cambrien inférieur, déduites de la comparaison numérique de nos simulations climatiques avec une base de données de roches portant un signal climatique. Les hexagones blancs représentent les roches sédimentaires formées durant le Cambrien inférieur et préservées aujourd’hui, qui ont servi de points de référence pour déterminer la correspondance entre le climat simulé et notre connaissance actuelle du climat du Cambrien inférieur. Les noms des continents sont en italique.

Certaines roches, comme les sédiments constitués de sels minéraux (évaporites) ou les dépôts marins tropicaux (calcaires à oolites), ne se forment que sous certaines conditions climatiques bien particulières, et constituent une base de données climatique indépendante des méthodes géochimiques habituellement utilisées. Cette base de données est particulièrement fiable, dans la mesure où il est bien plus difficile d’altérer le signal climatique porté par une roche dans son intégralité, que d’en modifier les propriétés géochimiques. Ces roches constituent donc une source de données climatiques plus complète, dans l’espace comme dans le temps, que les indicateurs géochimiques. Une équipe pluridisciplinaire de chercheurs européens et américains a soumis, pour la première fois dans le Cambrien, cette base de données géologique à une analyse quantitative dans le but d’apporter un éclairage nouveau sur notre planète il y a plus de 500 millions d’années. La comparaison de simulations climatiques globales du Cambrien inférieur avec la répartition des roches portant un signal climatique leur a permis de déterminer le climat et la configuration des continents permettant d’expliquer au mieux le registre sédimentaire. Cette approche numérique offre une vision unique de la Terre à l’époque de l’Explosion Cambrienne (Figure 1).

Les résultats indiquent que la diversification animale du Cambrien aurait eu lieu alors que l’essentiel des masses continentales étaient situées dans l’Hémisphère Sud, sous un climat significativement plus chaud qu’aujourd’hui, caractérisé par des températures océaniques de surface de l’ordre de 19°C aux pôles et 38°C aux latitudes tropicales. Ces résultats démontrent que l’intégration de modèles numériques et données géologiques dans un cadre analytique quantitatif permet d’améliorer la connaissance de notre planète dans le passé lointain, au moins jusqu’à 500 millions d’années.

 

1Affiliations des auteurs :

Department of Geology, Ghent University, 9000 Ghent, Belgium; School of Geography, Geology and the Environment, University of Leicester, Leicester, LE1 7RH, UK; Department of Earth and Planetary Sciences, University of California, Riverside, CA, USA; Biogéosciences, UMR 6282, UBFC/CNRS, Université Bourgogne Franche-Comté, 6 boulevard Gabriel, F-21000 Dijon, France; Aix-Marseille Univ, CNRS, IRD, INRA, Coll. France, CEREGE, Aix-en-Provence, France; Department of Earth & Planetary Sciences, Northwestern University, Evanston, IL, USA; Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement, LSCE/IPSL, CEA-CNRS-UVSQ, Université Paris-Saclay, F-91191 Gif-sur-Yvette, France ; INRAE, University of Bordeaux, BIOGECO, F-33610 Cestas, France ; Inria Bordeaux-Sud-Ouest, Pleiade, F-33405 Talence, France

 

Message aux éditeurs concernant le traitement de ce communiqué de presse

Cette étude ne démontre pas que le changement climatique contemporain d’origine anthropique sera bénéfique à la vie. Elle ne peut pas être utilisée à cette fin, ni pour nier ou amoindrir les dangers que représentent le changement climatique. Cette étude ne s’intéresse pas au climat actuel ni au changement climatique contemporain. Elle ne s’intéresse pas aux perturbations climatiques, mais a pour objectif de contraindre un état climatique donné dans le passé lointain. Les paramètres climatiques étaient drastiquement différents il y a 500 millions d’années. Les auteurs seront ravis d’apporter davantage d’explications au besoin.

 

Contact

Alexandre Pohl – alexandre.pohl@u-bourgogne.fr

 

Référence

Quantitative comparison of geological data and model simulations constrains early Cambrian geography and climate. Wong Hearing, T.W., Pohl, A., Williams, M., Donnadieu, Y., Harvey, T.H.P., Scotese, C.R., Sepulchre, P., Franc, A., Vandenbroucke, T.R.A. Nature Communications (2021)

extrait:
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La Terre, il y a 520 millions d’années, lorsque la vie animale s’est diversifiée dans les océans

La vie marine complexe, comprenant les ancêtres de la plupart des groupes d’animaux que l’on connaît aujourd’hui, s’est diversifiée dans les océans il y a environ 520 millions d’années, au cours de l’ « Explosion Cambrienne ». Des chercheurs belges, français, anglais et américains1 ont apporté un éclairage nouveau sur la position des continents et le climat de la Terre à cette époque critique pour l’évolution de la vie. Les résultats de l’étude sont publiés dans la revue Nature Communications.

 

La plupart des groupes d’animaux qui peuplent notre planète aujourd’hui sont apparus durant le Cambrien inférieur (il y a environ 520 millions d’années), marquant l’avènement de la biosphère complexe que l’on connaît aujourd’hui. Malgré l’importance de cette période pour l’évolution de la vie, la cadre dans lequel s’est produite l’Explosion Cambrienne, y-compris la configuration des continents et le climat de la Terre, reste mal contraint. De telles incertitudes persistent car la plupart des techniques utilisées pour reconstruire le climat et la position des continents sont difficiles à appliquer au passé si lointain. En effet, au fur et à mesure que l’on remonte dans le passé, la quantité de sédiments préservés diminue et les propriétés physico-chimiques primaires des roches sont de plus en plus altérées par les processus géologiques.

[caption id="attachment_8072" align="alignright" width="600"] Figure 1 : Configuration des continents et températures océaniques au cours du Cambrien inférieur, déduites de la comparaison numérique de nos simulations climatiques avec une base de données de roches portant un signal climatique. Les hexagones blancs représentent les roches sédimentaires formées durant le Cambrien inférieur et préservées aujourd’hui, qui ont servi de points de référence pour déterminer la correspondance entre le climat simulé et notre connaissance actuelle du climat du Cambrien inférieur. Les noms des continents sont en italique.[/caption]

Certaines roches, comme les sédiments constitués de sels minéraux (évaporites) ou les dépôts marins tropicaux (calcaires à oolites), ne se forment que sous certaines conditions climatiques bien particulières, et constituent une base de données climatique indépendante des méthodes géochimiques habituellement utilisées. Cette base de données est particulièrement fiable, dans la mesure où il est bien plus difficile d’altérer le signal climatique porté par une roche dans son intégralité, que d’en modifier les propriétés géochimiques. Ces roches constituent donc une source de données climatiques plus complète, dans l’espace comme dans le temps, que les indicateurs géochimiques. Une équipe pluridisciplinaire de chercheurs européens et américains a soumis, pour la première fois dans le Cambrien, cette base de données géologique à une analyse quantitative dans le but d’apporter un éclairage nouveau sur notre planète il y a plus de 500 millions d’années. La comparaison de simulations climatiques globales du Cambrien inférieur avec la répartition des roches portant un signal climatique leur a permis de déterminer le climat et la configuration des continents permettant d’expliquer au mieux le registre sédimentaire. Cette approche numérique offre une vision unique de la Terre à l’époque de l’Explosion Cambrienne (Figure 1).

Les résultats indiquent que la diversification animale du Cambrien aurait eu lieu alors que l’essentiel des masses continentales étaient situées dans l’Hémisphère Sud, sous un climat significativement plus chaud qu’aujourd’hui, caractérisé par des températures océaniques de surface de l’ordre de 19°C aux pôles et 38°C aux latitudes tropicales. Ces résultats démontrent que l’intégration de modèles numériques et données géologiques dans un cadre analytique quantitatif permet d’améliorer la connaissance de notre planète dans le passé lointain, au moins jusqu’à 500 millions d’années.

 

1Affiliations des auteurs :

Department of Geology, Ghent University, 9000 Ghent, Belgium; School of Geography, Geology and the Environment, University of Leicester, Leicester, LE1 7RH, UK; Department of Earth and Planetary Sciences, University of California, Riverside, CA, USA; Biogéosciences, UMR 6282, UBFC/CNRS, Université Bourgogne Franche-Comté, 6 boulevard Gabriel, F-21000 Dijon, France; Aix-Marseille Univ, CNRS, IRD, INRA, Coll. France, CEREGE, Aix-en-Provence, France; Department of Earth & Planetary Sciences, Northwestern University, Evanston, IL, USA; Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement, LSCE/IPSL, CEA-CNRS-UVSQ, Université Paris-Saclay, F-91191 Gif-sur-Yvette, France ; INRAE, University of Bordeaux, BIOGECO, F-33610 Cestas, France ; Inria Bordeaux-Sud-Ouest, Pleiade, F-33405 Talence, France

 

Message aux éditeurs concernant le traitement de ce communiqué de presse

Cette étude ne démontre pas que le changement climatique contemporain d’origine anthropique sera bénéfique à la vie. Elle ne peut pas être utilisée à cette fin, ni pour nier ou amoindrir les dangers que représentent le changement climatique. Cette étude ne s’intéresse pas au climat actuel ni au changement climatique contemporain. Elle ne s’intéresse pas aux perturbations climatiques, mais a pour objectif de contraindre un état climatique donné dans le passé lointain. Les paramètres climatiques étaient drastiquement différents il y a 500 millions d’années. Les auteurs seront ravis d’apporter davantage d’explications au besoin.

 

Contact

Alexandre Pohl – alexandre.pohl@u-bourgogne.fr

 

Référence

Quantitative comparison of geological data and model simulations constrains early Cambrian geography and climate. Wong Hearing, T.W., Pohl, A., Williams, M., Donnadieu, Y., Harvey, T.H.P., Scotese, C.R., Sepulchre, P., Franc, A., Vandenbroucke, T.R.A. Nature Communications (2021)

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