soutenance de thèse de Clotilde Hardy – mercredi 12 décembre 2012
Distribution phylogénétique des extinctions dans le registre fossile : apports à la compréhension de la dynamique de la biodiversité
Clotilde Hardy soutiendra sa thèse le mercredi 12 décembre 2012 à 14 h 30, amphithéâtre Courtois.
Résumé
L’extinction des espèces est devenue une préoccupation scientifique et sociétale majeure au cours des dernières décennies. D’une part les biologistes de la conservation consacrent beaucoup d’efforts à la compréhension de l’érosion de la biodiversité actuelle et ses conséquences potentielles. Les paléontologues, d’autre part, contribuent au débat en replaçant la diminution de la biodiversité dans une perspective historique. Ces deux approches dans l’étude des extinctions se rejoignent en intégrant un même facteur : la phylogénie. Cette convergence conceptuelle et méthodologique a déjà révélé que les risques actuels d’extinction et les extinctions passées sont phylogénétiquement non aléatoires : les taxons de certaines lignées sont systématiquement plus vulnérables que d’autres. Cette distribution phylogénétique non aléatoire est fréquente à plusieurs échelles spatiales et temporelles, ce qui suggère que l’extinction est liée à des traits (ou des combinaisons de traits) qui sont eux-mêmes phylogénétiquement conservés.
Cependant, il n’existe actuellement aucun consensus sur la façon de quantifier le groupement phylogénétique des extinctions car celles-ci correspondent à un état d’une variable binaire. Notre premier objectif est de trouver la méthode la plus appropriée pour tester et quantifier la distribution phylogénétique des extinctions. Nous avons étudié plusieurs indices statistiques publiés (I de Moran, D) ou inspirés de méthodes existantes (φ de Pearson et deux indices, R²mtl et R²sel, basés sur une transformation de la matrice de distance phylogénétique en coordonnées spatiales par une PcoA). Ces indices peuvent mesurer la corrélation phylogénétique en prenant en compte soit en une seule fois toutes les relations de parenté (I de Moran, D, R²mtl et R²sel) soit en l’évaluant pour des niveaux phylogénétiques successifs résumés dans un corrélogramme (I de Moran, φ de Pearson). Dans tous les cas, la significativité des indices est testée par permutation des espèces éteintes. Les résultats sur des données simulées montrent que si tous les indices peuvent déterminer la présence ou l’absence d’un groupement phylogénétique des extinctions, le D associé au corrélogrammes du φ de Pearson sont les indices les plus appropriés pour caractériser le signal phylogénétique des extinctions.
Par ailleurs, nous avons étudié la distribution phylogénétique des extinctions sur les ammonites (céphalopodes fossiles) du Jurassique Inférieur. Notre base de données possède l’une des meilleures résolutions temporelles disponibles pour un intervalle géologique aussi ancien. De plus, les ammonites de cette époque sont particulièrement diversifiées et présentent un excellent registre fossile. L’utilisation de l’ensemble des indices statistiques précédemment évalués montre que les extinctions d’ammonites sont significativement groupées phylogénétiquement pour la majorité des chronozones et des sous-chronozones de l’intervalle Pliensbachien-Toarcien. Ce résultat suggère un conservatisme phylogénétique de la vulnérabilité aux extinctions. Ce signal est persistant malgré la présence de facteurs potentiellement confondants, tels que les polytomies, les espèces stratigraphiques ou la présence de clades ne montrant aucune extinction. Parmi les rares intervalles présentant un signal phylogénétique non significatif, l’un d’entre eux correspond à la crise d’extinction de second ordre de la fin du Pliensbachien. Ce résultat particulier suggère une relation inverse entre l’intensité d’une crise d’extinction et sa sélectivité.
Ce travail apporte de nouvelles connaissances sur le lien entre phylogénie et extinction au sein de la biodiversité marine passée. Il identifie également de nouvelles perspectives, notamment la quantification du lien unissant le groupement phylogénétique des extinctions et certains traits biologiques à travers l’étude de la disparité morphologique et de la répartition géographique des espèces.
Composition du jury
Gilles Escarguel, université Claude Bernard, Lyon 1 – rapporteur
Loïc Villier, université Pierre et Marie Curie, Paris – rapporteur
Thierry Rigaud, université de Bourgogne – examinateur
Matthew Wills, university of Bath – examinateur
Christian Meister, Muséum d’histoire naturelle de Genève – examinateur
Emmanuel Fara, université de Bourgogne – codirecteur de thèse
Pascal Neige, université de Bourgogne – directeur de thèse
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Distribution phylogénétique des extinctions dans le registre fossile : apports à la compréhension de la dynamique de la biodiversité
Clotilde Hardy soutiendra sa thèse le mercredi 12 décembre 2012 à 14 h 30, amphithéâtre Courtois.Résumé
L’extinction des espèces est devenue une préoccupation scientifique et sociétale majeure au cours des dernières décennies. D’une part les biologistes de la conservation consacrent beaucoup d'efforts à la compréhension de l’érosion de la biodiversité actuelle et ses conséquences potentielles. Les paléontologues, d'autre part, contribuent au débat en replaçant la diminution de la biodiversité dans une perspective historique. Ces deux approches dans l’étude des extinctions se rejoignent en intégrant un même facteur : la phylogénie. Cette convergence conceptuelle et méthodologique a déjà révélé que les risques actuels d’extinction et les extinctions passées sont phylogénétiquement non aléatoires : les taxons de certaines lignées sont systématiquement plus vulnérables que d'autres. Cette distribution phylogénétique non aléatoire est fréquente à plusieurs échelles spatiales et temporelles, ce qui suggère que l'extinction est liée à des traits (ou des combinaisons de traits) qui sont eux-mêmes phylogénétiquement conservés.
Cependant, il n'existe actuellement aucun consensus sur la façon de quantifier le groupement phylogénétique des extinctions car celles-ci correspondent à un état d’une variable binaire. Notre premier objectif est de trouver la méthode la plus appropriée pour tester et quantifier la distribution phylogénétique des extinctions. Nous avons étudié plusieurs indices statistiques publiés (I de Moran, D) ou inspirés de méthodes existantes (φ de Pearson et deux indices, R²mtl et R²sel, basés sur une transformation de la matrice de distance phylogénétique en coordonnées spatiales par une PcoA). Ces indices peuvent mesurer la corrélation phylogénétique en prenant en compte soit en une seule fois toutes les relations de parenté (I de Moran, D, R²mtl et R²sel) soit en l’évaluant pour des niveaux phylogénétiques successifs résumés dans un corrélogramme (I de Moran, φ de Pearson). Dans tous les cas, la significativité des indices est testée par permutation des espèces éteintes. Les résultats sur des données simulées montrent que si tous les indices peuvent déterminer la présence ou l'absence d'un groupement phylogénétique des extinctions, le D associé au corrélogrammes du φ de Pearson sont les indices les plus appropriés pour caractériser le signal phylogénétique des extinctions.
[caption id="attachment_1310" align="alignnone" width="160"] Cliquer pour agrandir[/caption]Par ailleurs, nous avons étudié la distribution phylogénétique des extinctions sur les ammonites (céphalopodes fossiles) du Jurassique Inférieur. Notre base de données possède l'une des meilleures résolutions temporelles disponibles pour un intervalle géologique aussi ancien. De plus, les ammonites de cette époque sont particulièrement diversifiées et présentent un excellent registre fossile. L’utilisation de l’ensemble des indices statistiques précédemment évalués montre que les extinctions d'ammonites sont significativement groupées phylogénétiquement pour la majorité des chronozones et des sous-chronozones de l’intervalle Pliensbachien-Toarcien. Ce résultat suggère un conservatisme phylogénétique de la vulnérabilité aux extinctions. Ce signal est persistant malgré la présence de facteurs potentiellement confondants, tels que les polytomies, les espèces stratigraphiques ou la présence de clades ne montrant aucune extinction. Parmi les rares intervalles présentant un signal phylogénétique non significatif, l’un d’entre eux correspond à la crise d’extinction de second ordre de la fin du Pliensbachien. Ce résultat particulier suggère une relation inverse entre l’intensité d’une crise d’extinction et sa sélectivité.
Ce travail apporte de nouvelles connaissances sur le lien entre phylogénie et extinction au sein de la biodiversité marine passée. Il identifie également de nouvelles perspectives, notamment la quantification du lien unissant le groupement phylogénétique des extinctions et certains traits biologiques à travers l'étude de la disparité morphologique et de la répartition géographique des espèces.
Composition du juryGilles Escarguel, université Claude Bernard, Lyon 1 – rapporteur
Loïc Villier, université Pierre et Marie Curie, Paris – rapporteur
Thierry Rigaud, université de Bourgogne – examinateur
Matthew Wills, university of Bath – examinateur
Christian Meister, Muséum d'histoire naturelle de Genève – examinateur
Emmanuel Fara, université de Bourgogne – codirecteur de thèse
Pascal Neige, université de Bourgogne – directeur de thèse