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les nouvelles imageries multispectrales et synchrotron illuminent les fossiles du Paris Biota

Etiquette(s) : articles et presse

En 2017, une équipe internationale de paléontologues et sédimentologues publiait le premier gisement paléontologique marin à préservation exceptionnelle daté du Trias inférieur : le Paris Biota1. Daté de moins de 1,5 millions d’années après l’extinction de masse de la limite Permien/Trias (251,9 millions d’années), cet écosystème fossile diversifié et complexe remet en cause plusieurs scénarios couramment admis pour le Trias inférieur. Jusqu’à présent, la plupart des fossiles du Paris Biota n’avaient pas encore pu être formellement décrits, notamment car ils nécessitaient une préparation manuelle très délicate et risquée afin d’accéder aux structures anatomiques cachées dans la matrice sédimentaire. De plus, ces fossiles étant aplatis, la traditionnelle microtomographie à rayons X ne permet pas d’obtenir d’informations complémentaires sur ces fossiles aussi rares que fragiles. Un travail interdisplinaire de fond mené sur deux années aura été nécessaire pour étudier les centaines de spécimens fossiles trouvés à ce jour. Ces travaux, menés en collaboration entre différents laboratoires français2 et étrangers, viennent de faire l’objet d’un volume entier de la revue Geobios paru au mois de juin3.

Plus particulièrement, l’utilisation de techniques d’imagerie multispectrale développées par le laboratoire IPANEMA, inédites en paléontologie, combinée à la cartographie d’éléments chimiques rendue possible grâce à la micro-fluorescence de rayons X réalisée sur la ligne de lumière DiffAbs du synchrotron Soleil, ont révélé l’existence de nombreux détails anatomiques, à travers des contrastes physico-chimiques au sein des fossiles, jusqu’alors non détectés. Certains caractères anatomiques cachées dans la matrice sédimentaire couvrant le spécimen ont ainsi pu être dévoilés (Figure 1). A la plus grande surprise de l’équipe de chercheurs, de spectaculaires spécimens « fantômes », invisibles ou quasi imperceptibles en lumière naturelle, sont apparus aux côtés d’autres spécimens, eux parfaitement visibles (Figure 2).

Ces travaux fournissent de nombreuses informations nouvelles sur la paléobiologie, le paléoenvironnement ainsi que la préservation de ces organismes appartenant à un écosystème unique. Elles questionnent également la diversité et l’abondance réelles de ces organismes, à l’évidence encore largement sous-estimées. Dans le contexte du Trias inférieur, pour lequel diversité et abondance des organismes dans les assemblages locaux et régionaux sont des paramètres clés pour élaborer des scénarios précis de rediversification post-crise, ces études soulignent qu’il sera primordial d’intensifier les efforts d’échantillonnage tout en utilisant régulièrement de telles méthodes d’imagerie pour différents sites et paléoenvironnements. Appliquée à d’autres gisements paléontologiques de par le monde, les nouvelles approches déployées permettront sans doute dans les années à venir de révéler de nouveaux contenus paléontologiques jusqu’alors insoupçonnés.

1 Voir «   Après la plus grande extinction de tous les temps, des fossiles exceptionnels dévoilent une biodiversité inattendue »:
–    http://archives.cnrs.fr/inee/article/b247.

2 Le Laboratoire Biogéosciences (UMR 6282 CNRS/Université de Bourgogne), le Laboratoire Magmas et Volcans (UMR 6524 CNRS/IRD/Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand), l’Institut de Génomique Fonctionnelle de Lyon (UMR 5242 CNRS/ENS de Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1), le Laboratoire d’Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés (UMR 5023 CNRS/ENTPE/Université Claude Bernard Lyon 1), le Centre de Recherche en Paléontologie (UMR 7207 CNRS/MNHN/Sorbonne Université) et IPANEMA (CNRS/Ministère de la Culture/Univ Versailles Saint-Quentin).

3 https://www.sciencedirect.com/journal/geobios/vol/54/suppl/C.
Brayard A., Fara E., Escarguel G. (édits.), 2019. The Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA): an exceptional window on the Early Triassic marine life. Geobios 54, pp. 1-94.

Les travaux de l’équipe coordonnée par A. Brayard (Biogéosciences), initialement soutenus par la FRB (Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité), le CNRS (Programme INSU-INTERRVIE), et par l’Agence Nationale de la Recherche (projet « AFTER » 2013-2017), sont actuellement financées par l’I-SITE Bourgogne Franche-Comté.

Références des différents articles du volume spécial:
–    Brayard A., Fara E., & Escarguel G., 2019: Foreword for the thematic issue “The Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA): an exceptional window on the Early Triassic marine life”. Geobios 54: 1-3.
–    Botting J., Brayard A. & the Paris Biota team, 2019: A late-surviving Triassic protomonaxonid sponge from the Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 5-11.
–    Brayard A., Jenks J., Bylund K.G. & the Paris Biota team, 2019: Ammonoids and nautiloids from the earliest Spathian Paris Biota and other early Spathian localities in southeastern Idaho, USA. Geobios 54: 13-36.
–    Charbonnier S., Brayard A. & the Paris Biota team, 2019: New thylacocephalans from the Early Triassic Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 37-43.
–    Saucède T., Vennin E., Fara E., Olivier N. & the Paris Biota team, 2019: A new holocrinid (Articulata) from the Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA) highlights the high diversity of Early Triassic crinoids. Geobios 54: 45-53.
–    Thuy B., Escarguel G. & the Paris Biota team, 2019: A new brittle star (Ophiuroidea: Ophiodermatina) from the Early Triassic Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 55-61.
–    Romano C., Argyriou T., Krumenacker L.J. & the Paris Biota team, 2019: Chondrichthyan teeth from the Early Triassic Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 63-70.
–    Brayard A., Gueriau P., Thoury M., Escarguel G. & the Paris Biota team, 2019: Glow in the dark: use of synchrotron μXRF trace elemental mapping and multispectral macro-imaging on fossils from the Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 71-79.
–    Iniesto M., Thomazo C., Fara E. & the Paris Biota team, 2019: Deciphering the exceptional preservation of the Early Triassic Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 81-93.

Contacts scientifiques:
–    Arnaud Brayard | T 03 80 39 36 95 | arnaud.brayard@u-bourgogne.fr
–    Mathieu Thoury | T 01 69 35 81 97 | mathieu.thoury@synchrotron-soleil.fr
–    Gilles Escarguel | T 04 72 44 84 24| gilles.escarguel@univ-lyon1.fr

Figure 1 :


Fig. 1. Tige proximal d’un crinoïde du Paris Biota sous lumière naturelle (A) et par cartographie de micro-fluorescence des rayons X (B) (carte/distribution du strontium obtenue sur la ligne DiffAbs du synchrotron Soleil) révélant la présence de nombreuses cirres cachées dans la matrice sédimentaire. Modifié d’après Saucède et al. (2019). Barre d’échelle : 10 mm.

Figure 2 :

Fig. 2. Vue d’une plaque fossilifère du Paris Biota sous lumière naturelle (A) et image composite correspondante (B) obtenue sous différents couples d’illumination/détection, notamment en infrarouge, révélant la présence de plusieurs spécimens « fantômes » de crevettes (« c ») alors que ces dernières sont très faiblement détectables sous lumière naturelle. « e » : écaille de poisson. La taille du spécimen en haut de l’image B est de 20 mm. Modifié d’après Brayard et al. (2019).

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En 2017, une équipe internationale de paléontologues et sédimentologues publiait le premier gisement paléontologique marin à préservation exceptionnelle daté du Trias inférieur : le Paris Biota1. Daté de moins de 1,5 millions d’années après l’extinction de masse de la limite Permien/Trias (251,9 millions d’années), cet écosystème fossile diversifié et complexe remet en cause plusieurs scénarios couramment admis pour le Trias inférieur. Jusqu’à présent, la plupart des fossiles du Paris Biota n'avaient pas encore pu être formellement décrits, notamment car ils nécessitaient une préparation manuelle très délicate et risquée afin d’accéder aux structures anatomiques cachées dans la matrice sédimentaire. De plus, ces fossiles étant aplatis, la traditionnelle microtomographie à rayons X ne permet pas d’obtenir d’informations complémentaires sur ces fossiles aussi rares que fragiles. Un travail interdisplinaire de fond mené sur deux années aura été nécessaire pour étudier les centaines de spécimens fossiles trouvés à ce jour. Ces travaux, menés en collaboration entre différents laboratoires français2 et étrangers, viennent de faire l’objet d’un volume entier de la revue Geobios paru au mois de juin3.

Plus particulièrement, l’utilisation de techniques d’imagerie multispectrale développées par le laboratoire IPANEMA, inédites en paléontologie, combinée à la cartographie d’éléments chimiques rendue possible grâce à la micro-fluorescence de rayons X réalisée sur la ligne de lumière DiffAbs du synchrotron Soleil, ont révélé l’existence de nombreux détails anatomiques, à travers des contrastes physico-chimiques au sein des fossiles, jusqu’alors non détectés. Certains caractères anatomiques cachées dans la matrice sédimentaire couvrant le spécimen ont ainsi pu être dévoilés (Figure 1). A la plus grande surprise de l’équipe de chercheurs, de spectaculaires spécimens « fantômes », invisibles ou quasi imperceptibles en lumière naturelle, sont apparus aux côtés d’autres spécimens, eux parfaitement visibles (Figure 2).

Ces travaux fournissent de nombreuses informations nouvelles sur la paléobiologie, le paléoenvironnement ainsi que la préservation de ces organismes appartenant à un écosystème unique. Elles questionnent également la diversité et l’abondance réelles de ces organismes, à l’évidence encore largement sous-estimées. Dans le contexte du Trias inférieur, pour lequel diversité et abondance des organismes dans les assemblages locaux et régionaux sont des paramètres clés pour élaborer des scénarios précis de rediversification post-crise, ces études soulignent qu'il sera primordial d'intensifier les efforts d'échantillonnage tout en utilisant régulièrement de telles méthodes d'imagerie pour différents sites et paléoenvironnements. Appliquée à d’autres gisements paléontologiques de par le monde, les nouvelles approches déployées permettront sans doute dans les années à venir de révéler de nouveaux contenus paléontologiques jusqu’alors insoupçonnés.

1 Voir «   Après la plus grande extinction de tous les temps, des fossiles exceptionnels dévoilent une biodiversité inattendue »:
-    http://archives.cnrs.fr/inee/article/b247.

2 Le Laboratoire Biogéosciences (UMR 6282 CNRS/Université de Bourgogne), le Laboratoire Magmas et Volcans (UMR 6524 CNRS/IRD/Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand), l’Institut de Génomique Fonctionnelle de Lyon (UMR 5242 CNRS/ENS de Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1), le Laboratoire d’Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés (UMR 5023 CNRS/ENTPE/Université Claude Bernard Lyon 1), le Centre de Recherche en Paléontologie (UMR 7207 CNRS/MNHN/Sorbonne Université) et IPANEMA (CNRS/Ministère de la Culture/Univ Versailles Saint-Quentin).

3 https://www.sciencedirect.com/journal/geobios/vol/54/suppl/C.
Brayard A., Fara E., Escarguel G. (édits.), 2019. The Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA): an exceptional window on the Early Triassic marine life. Geobios 54, pp. 1-94.

Les travaux de l’équipe coordonnée par A. Brayard (Biogéosciences), initialement soutenus par la FRB (Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité), le CNRS (Programme INSU-INTERRVIE), et par l’Agence Nationale de la Recherche (projet « AFTER » 2013-2017), sont actuellement financées par l’I-SITE Bourgogne Franche-Comté.

Références des différents articles du volume spécial:
-    Brayard A., Fara E., & Escarguel G., 2019: Foreword for the thematic issue “The Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA): an exceptional window on the Early Triassic marine life”. Geobios 54: 1-3.
-    Botting J., Brayard A. & the Paris Biota team, 2019: A late-surviving Triassic protomonaxonid sponge from the Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 5-11.
-    Brayard A., Jenks J., Bylund K.G. & the Paris Biota team, 2019: Ammonoids and nautiloids from the earliest Spathian Paris Biota and other early Spathian localities in southeastern Idaho, USA. Geobios 54: 13-36.
-    Charbonnier S., Brayard A. & the Paris Biota team, 2019: New thylacocephalans from the Early Triassic Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 37-43.
-    Saucède T., Vennin E., Fara E., Olivier N. & the Paris Biota team, 2019: A new holocrinid (Articulata) from the Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA) highlights the high diversity of Early Triassic crinoids. Geobios 54: 45-53.
-    Thuy B., Escarguel G. & the Paris Biota team, 2019: A new brittle star (Ophiuroidea: Ophiodermatina) from the Early Triassic Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 55-61.
-    Romano C., Argyriou T., Krumenacker L.J. & the Paris Biota team, 2019: Chondrichthyan teeth from the Early Triassic Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 63-70.
-    Brayard A., Gueriau P., Thoury M., Escarguel G. & the Paris Biota team, 2019: Glow in the dark: use of synchrotron μXRF trace elemental mapping and multispectral macro-imaging on fossils from the Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 71-79.
-    Iniesto M., Thomazo C., Fara E. & the Paris Biota team, 2019: Deciphering the exceptional preservation of the Early Triassic Paris Biota (Bear Lake County, Idaho, USA). Geobios 54: 81-93.

Contacts scientifiques:
-    Arnaud Brayard | T 03 80 39 36 95 | arnaud.brayard@u-bourgogne.fr
-    Mathieu Thoury | T 01 69 35 81 97 | mathieu.thoury@synchrotron-soleil.fr
-    Gilles Escarguel | T 04 72 44 84 24| gilles.escarguel@univ-lyon1.fr

Figure 1 :


Fig. 1. Tige proximal d’un crinoïde du Paris Biota sous lumière naturelle (A) et par cartographie de micro-fluorescence des rayons X (B) (carte/distribution du strontium obtenue sur la ligne DiffAbs du synchrotron Soleil) révélant la présence de nombreuses cirres cachées dans la matrice sédimentaire. Modifié d’après Saucède et al. (2019). Barre d’échelle : 10 mm.

Figure 2 :

Fig. 2. Vue d’une plaque fossilifère du Paris Biota sous lumière naturelle (A) et image composite correspondante (B) obtenue sous différents couples d’illumination/détection, notamment en infrarouge, révélant la présence de plusieurs spécimens « fantômes » de crevettes (« c ») alors que ces dernières sont très faiblement détectables sous lumière naturelle. « e » : écaille de poisson. La taille du spécimen en haut de l’image B est de 20 mm. Modifié d’après Brayard et al. (2019).

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