thèse de Paul-Arthur Monerie
Le changement climatique en région de mousson africaine : évolution des champs pluviométriques et atmosphériques dans les simulations CMIP3 et CMIP5 sous scénario A1B et rcp4.5, (1960-1999, 2031-2070)
Soutenue le 18 juin 2013
Directeur : Bernard Fontaine ; coencadrant : Pascal Roucou
Le document de thèse est téléchargeable sur tel.archives-ouvertes.fr.
Résumé
Le quatrième rapport du GIEC en 2007 a fait la synthèse des travaux préalablement parus sur les effets du changement climatique aux échelles globale et régionale. Il montre en particulier qu’aucun consensus ne peut être trouvé pour ce qui concerne l’évolution future de la pluviométrie — et de la dynamique atmosphérique associée — en région de mousson africaine. Ce mémoire revisite cette question à la lumière des nouvelles données disponibles et selon une approche évitant toute surreprésentation du nombre de simulations disponibles pour un type de modèle donné, tout en prenant en compte la diversité des modèles ainsi que leur évolution dans le temps : sorties de vingt modèles de circulation générale (MCGs) ayant participé aux exercices CMIP3 (douze MCGs) et CMIP5 (huit MCGs) sous les scénarios d’émissions A1B et rcp4.5, respectivement. Les sorties sont analysées principalement sur deux fenêtres de quarante ans — périodes actuelle (1960-1999) et future (2031-2070) — et les résultats discutés au regard de leur vraisemblance selon une approche permettant à la fois de quantifier les différences futur moins actuel, de mesurer les significativités et les robustesses statistiques et d’associer une probabilité mesurant le consensus des modèles en fonction des échelles et des variables considérées.
Les analyses menées sur CMIP3 et CMIP5 montrent qu’un consensus sur l’effet du changement climatique en Afrique de l’Ouest peut être obtenu si l’on ne fait pas de l’ensemble de la bande sahélienne une entité homogène et qu’on raisonne à des échelles spatiales inférieures. Les résultats révèlent une évolution contrastée entre le centre et l’ouest du Sahel avec, pour le futur (i) une hausse des précipitations au centre s’expliquant surtout par une plus grande convergence des flux dans les basses couches, ainsi qu’une pénétration plus au nord de la mousson ; (ii) une baisse des précipitations à l’ouest s’expliquant par le renforcement de la circulation de type Walker, du Jet d’Est Africain (JEA) et de la subsidence dans les couches moyennes. Par ailleurs, on peut s’attendre à une modification du cycle annuel moyen avec un retrait retardé de la mousson. Ce retard est notamment lié aux apports supplémentaires d’humidité depuis l’Atlantique, dus au renforcement des contrastes thermiques et d’humidité entre océan et continent, mais aussi et surtout aux apports tardifs d’humidité depuis la Méditerranée et au renforcement des flux de nord en septembre et octobre en direction du Sahel.
Mots-clés
changement climatique, mousson africaine, Sahel, modèles de circulation générale, CMIP3, CMIP5, scénarios d’émission A1B et rcp45
Membres du jury
Bernard Fontaine : directeur
Pascal Roucou : coencadrant
Thierry Lebel : rapporteur
Benjamin Sultan : rapporteur
Paolo Ruti : examinateur
Serge Janicot : examinateur
La mousson d’Afrique de l’Ouest
La saison des pluies apporte chaque été les précipitations essentielles à l’agriculture des pays du Sahel. Au cours des dernières années, des épisodes de sécheresses intenses se sont fréquemment produits, concernant l’ensemble du continent Africain et mettent en jeu les conditions de vie de centaines de milliers de personnes. Dans la région du Sahel en Afrique de l’ouest où la principale activité économique est l’agriculture de subsistance, la période de sécheresse des années 1970 et 1980 a engendrée une réduction de la production agricole. L’échec successif des politiques agricoles a engendré crise alimentaire, malnutrition, détérioration de la santé publique, voire famine, entrainant la perte de vies humaines et d’une partie importante du cheptel. Les économies sahéliennes ont été perturbées, ce qui a poussé de nombreuses communautés pastorales du Tchad, du Niger et du Soudan sur les routes migratoires à destination de N’djamena, Niamey ou Khartoum, capitales de ces Etats. Il est donc important de bien connaître ce phénomène et d’arriver à prédire, anticiper son évolution, notamment dans le contexte actuel du changement climatique. Il paraît indispensable d’être capable de simuler les modifications climatiques et leurs impacts suffisamment à l’avance, pour permettre aux sociétés concernées de s’adapter, particulièrement en matière d’agriculture et de santé.
Ce phénomène a motivé la création du programme international AMMA (Analyse Multidisciplinaire de la Mousson Africaine) (Redelsperger et al., 2006) dont l’un des principaux objectifs est l’amélioration de la compréhension de la Mousson d’Afrique de l’Ouest (MAO), en vue d’une meilleure prévision. Le projet est motivé par la forte variabilité des précipitations associées à ce système de mousson, et par ses conséquences sur la sécurité alimentaire, les ressources en eau et la santé.
La saison des pluies se met en place en raison de gradients de température et de pression entre la côte de Guinée et le désert du Sahara. Elle est associée à des précipitations importantes et à des changements de dynamique dans la circulation atmosphérique en été (Peyrillé et al. 2006). (Le système de la mousson est expliqué très brièvement dans l’encadré 1).
En réponse au déséquilibre énergétique et au gradient de pression créés, et en lien avec le renforcement de l’anticyclone de St-Hélène en situation hivernale, les alizés de l’hémisphère sud qui sont chargés en vapeur d’eau au dessus du golfe de Guinée pénètrent sur le continent ouest-Africain loin vers le nord en prenant une composante de sud-ouest sous l’effet de la force de Coriolis. (S. Janicot et B. Fontaine. 1993). L’air chargé en humidité se propage ainsi de l’océan au continent, permettant l’arrivée des pluies sur l’Afrique de l’ouest, c’est le moment de plein développement de la mousson.
Encadré 1: La mousson résulte d’un déséquilibre énergétique entre le continent au nord et l’océan au sud. La température de l’océan, de part son inertie thermique (sa capacité calorifique), varie moins que celle du continent. En été, le continent devient alors plus chaud que l’océan. Une dépression thermique de surface (une zone de basse pression, BP) se développe sur le continent. Elle s’accompagne d’un gradient de pression important entre le continent et l’océan. Une zone de plus haute pression (HP) se situe alors sur l’océan, donnant naissance à un flux de surface entre ces deux entités, le flux de mousson. L’air plus chaud au dessus du continent s’élève et se refroidit, il se forme une cellule de type Hadley orientée sud/nord comme suit :
En Afrique de l’ouest la zone correspondante à la mousson sur l’océan est le golfe de Guinée où le flux de mousson (les alizés) se charge en humidité. L’eau s’y refroidit en été notamment grâce à l’établissement d’un upwelling sur les côtes Africaines permettant un apport en eaux plus froides (par le biais des courants océaniques). Sur le Sahara, le réchauffement est dû à l’augmentation du rayonnement reçu en été boréal. Le moteur de la circulation de la mousson est donc l’inégale variation de température entre ces deux zones.
La branche ascendante de la circulation de mousson est localisée au niveau de la ZCIT (Zone de Convergence Intertropicale), aussi appelée Equateur Météorologique (EM). Elle est marquée par une ascendance d’air chaud et humide et la création de systèmes nuageux de type cumulo-nimbus. C’est une zone de concentration de la vapeur d’eau, advectée par les alizés et les circulations de mousson dans les basses couches. Ainsi se met en place au niveau de la ZCIT d’importantes précipitations. La migration de la mousson vers le nord s’accompagne de celle de la ZCIT et se produit selon plusieurs phases.. Durant sa migration elle apportera des pluies en premier lieu sur les côtes du Golfe de Guinée entre Avril et Juin. Au Sahel, son onset, c’est à dire son commencement se produit au moment du ‘saut de mousson’, le 24 Juin en moyenne (avec une déviation standard de 8 jours) (Sultan et Janicot, 2003) et dure généralement jusqu’en Septembre. La ZCIT redescend alors vers le Sud pour se diriger progressivement vers l’hémisphère Sud et ainsi suivre la marche annuelle du soleil.
La figure 1 montre plus en détail la structure de la mousson en y incorporant la circulation zonale et les principaux jet impliqués dans le transport et la variabilité des précipitations :
La confluence du flux de mousson et de l’Harmattan (vent sec engendré par les différences de pressions et de températures entre le Sahara et la mer Méditerranée) arrivant du nord est connue sous le nom de Front Inter Tropical (FIT) (Hall et Peyrillé 2006). Le flux de mousson à mesure qu’il monte vers le nord du continent s’assèche (notamment en fournissant de la vapeur d’eau au niveau de la ZCIT, vers 10°N de latitude). Au niveau du FIT se sont alors deux courant sec qui se rencontrent. Il se crée une zone d’ascension moins forte et donc moins en profondeur qu’au niveau de la ZCIT (car il manque d’humidité). Un air chaud et sec monte alors en altitude vers 20°N, il s’agit de l’air du Sahara (Saharan Air Layer, SAL). Le SAL a comme conséquence une inhibition de la convection, il est difficile pour les événements convectifs isolés de parvenir jusqu’au Sahel. C’est en revanche d’avantage le cas pour des phénomènes de méso-échelles (d’environ 150 000 km2), à savoir les Systèmes convectifs de méso-échelles SCM. Ceux-ci représentent plus de 90% des pluies au Sahel (Mathon et Laurent 2002).
L’air étant dévié vers l’est par la force de Coriolis la circulation méridienne (flux de mousson, Harmattant, circulation de Hadley) est couplée à une circulation zonale. Le Jet d’est tropical (JET) passe au dessus du continent et du Golfe de Guinée (16 km d’altitude) (Koteswaram, 1958 ; Hastenrath, 1995). Il prend naissance en altitude par le gradient de pressions et de températures entre les hauts plateaux du Tibet et l’Inde, il est alors dévié vers l’est par la force de Coriolis. A des altitudes plus basses, le Jet d’Est African (JEA) se crée lorsque l’air sec (du Sahara) rejoint l’air humide (de la côte de Guinée) (Thorncroft et Blackburn, 1999). Le JEA est le lieu de développement des ondes d’Est Africaines (AEWs : African Easterly Waves) qui contribuent à la variabilité dans le flux et la quantité des précipitations de la mousson (Hall et Peyrillé, 2006). Le JEA fournit l’énergie aux perturbations du climat et propage ces perturbations sur le continent. (Long et al., 2000).
Différents mécanismes permettent de modifier la circulation atmosphérique, il s’agit des forçages de la mousson, ceux rentrant en compte dans le transport d’humidités sont schématisés sur la figure 2 :
En Juin les températures de surfaces du Golfe de Guinée sont plus faible de 2°C (refroidissement lié à un upwelling saisonnier concomitant du réchauffement du continent en été). Le gradient thermique entre l’océan et le continent est accentué, favorisant la progression de la mousson vers le nord. Ainsi, des SST du golfe de Guinée plus élevées (faibles) permettent de réduire (augmenter) l’expansion vers le nord de la mousson. Les températures de surface de la Mer Méditerranée plus chaudes favorisent sa pénétration sur le Sahel (Peyrillé et al., 2006, et Rowell, 2003) Lorsque la Méditerranée est chaude (froide) l’Harmattan est renforcé (affaiblit) et empêche (favorise) la remontée du FIT et donc du système de mousson vers le nord du continent (Peyrillé 2006). Le changement d’insolation du printemps jusqu’en été et les aérosols permettent aussi de modifier la migration de la MAO (Peyrillé et al., 2006). Pour Janicot et Fontaine (1993), le mouvement vers le nord de la ZCIT est en effet amplifié par un important gradient méridien de pression dans les basses-couches de la troposphère, résultant de la mise en place d’une forte dépression thermique de surface au-dessus du Sahara.
Animations :
Déplacement de la ZCIT repérée par l’humidité spécifique: zcit
Evolution annuelle de la température sur trois ans : Température en Afrique
Position et évolution de la dépression saharienne, le heat low : Heat Low
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- 18 juin 2013
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Le changement climatique en région de mousson africaine : évolution des champs pluviométriques et atmosphériques dans les simulations CMIP3 et CMIP5 sous scénario A1B et rcp4.5, (1960-1999, 2031-2070)
Soutenue le 18 juin 2013
Directeur : Bernard Fontaine ; coencadrant : Pascal Roucou
Le document de thèse est téléchargeable sur tel.archives-ouvertes.fr.
Résumé
Le quatrième rapport du GIEC en 2007 a fait la synthèse des travaux préalablement parus sur les effets du changement climatique aux échelles globale et régionale. Il montre en particulier qu’aucun consensus ne peut être trouvé pour ce qui concerne l’évolution future de la pluviométrie — et de la dynamique atmosphérique associée — en région de mousson africaine. Ce mémoire revisite cette question à la lumière des nouvelles données disponibles et selon une approche évitant toute surreprésentation du nombre de simulations disponibles pour un type de modèle donné, tout en prenant en compte la diversité des modèles ainsi que leur évolution dans le temps : sorties de vingt modèles de circulation générale (MCGs) ayant participé aux exercices CMIP3 (douze MCGs) et CMIP5 (huit MCGs) sous les scénarios d’émissions A1B et rcp4.5, respectivement. Les sorties sont analysées principalement sur deux fenêtres de quarante ans — périodes actuelle (1960-1999) et future (2031-2070) — et les résultats discutés au regard de leur vraisemblance selon une approche permettant à la fois de quantifier les différences futur moins actuel, de mesurer les significativités et les robustesses statistiques et d’associer une probabilité mesurant le consensus des modèles en fonction des échelles et des variables considérées.
Les analyses menées sur CMIP3 et CMIP5 montrent qu’un consensus sur l’effet du changement climatique en Afrique de l’Ouest peut être obtenu si l’on ne fait pas de l’ensemble de la bande sahélienne une entité homogène et qu’on raisonne à des échelles spatiales inférieures. Les résultats révèlent une évolution contrastée entre le centre et l’ouest du Sahel avec, pour le futur (i) une hausse des précipitations au centre s’expliquant surtout par une plus grande convergence des flux dans les basses couches, ainsi qu’une pénétration plus au nord de la mousson ; (ii) une baisse des précipitations à l’ouest s’expliquant par le renforcement de la circulation de type Walker, du Jet d’Est Africain (JEA) et de la subsidence dans les couches moyennes. Par ailleurs, on peut s’attendre à une modification du cycle annuel moyen avec un retrait retardé de la mousson. Ce retard est notamment lié aux apports supplémentaires d’humidité depuis l’Atlantique, dus au renforcement des contrastes thermiques et d’humidité entre océan et continent, mais aussi et surtout aux apports tardifs d’humidité depuis la Méditerranée et au renforcement des flux de nord en septembre et octobre en direction du Sahel.
Mots-clés
changement climatique, mousson africaine, Sahel, modèles de circulation générale, CMIP3, CMIP5, scénarios d’émission A1B et rcp45
Membres du jury
Bernard Fontaine : directeur
Pascal Roucou : coencadrant
Thierry Lebel : rapporteur
Benjamin Sultan : rapporteur
Paolo Ruti : examinateur
Serge Janicot : examinateurLa mousson d'Afrique de l'Ouest
La saison des pluies apporte chaque été les précipitations essentielles à l’agriculture des pays du Sahel. Au cours des dernières années, des épisodes de sécheresses intenses se sont fréquemment produits, concernant l’ensemble du continent Africain et mettent en jeu les conditions de vie de centaines de milliers de personnes. Dans la région du Sahel en Afrique de l’ouest où la principale activité économique est l’agriculture de subsistance, la période de sécheresse des années 1970 et 1980 a engendrée une réduction de la production agricole. L’échec successif des politiques agricoles a engendré crise alimentaire, malnutrition, détérioration de la santé publique, voire famine, entrainant la perte de vies humaines et d’une partie importante du cheptel. Les économies sahéliennes ont été perturbées, ce qui a poussé de nombreuses communautés pastorales du Tchad, du Niger et du Soudan sur les routes migratoires à destination de N’djamena, Niamey ou Khartoum, capitales de ces Etats. Il est donc important de bien connaître ce phénomène et d’arriver à prédire, anticiper son évolution, notamment dans le contexte actuel du changement climatique. Il paraît indispensable d’être capable de simuler les modifications climatiques et leurs impacts suffisamment à l’avance, pour permettre aux sociétés concernées de s’adapter, particulièrement en matière d’agriculture et de santé.
Ce phénomène a motivé la création du programme international AMMA (Analyse Multidisciplinaire de la Mousson Africaine) (Redelsperger et al., 2006) dont l’un des principaux objectifs est l’amélioration de la compréhension de la Mousson d’Afrique de l’Ouest (MAO), en vue d’une meilleure prévision. Le projet est motivé par la forte variabilité des précipitations associées à ce système de mousson, et par ses conséquences sur la sécurité alimentaire, les ressources en eau et la santé.
La saison des pluies se met en place en raison de gradients de température et de pression entre la côte de Guinée et le désert du Sahara. Elle est associée à des précipitations importantes et à des changements de dynamique dans la circulation atmosphérique en été (Peyrillé et al. 2006). (Le système de la mousson est expliqué très brièvement dans l’encadré 1).
En réponse au déséquilibre énergétique et au gradient de pression créés, et en lien avec le renforcement de l’anticyclone de St-Hélène en situation hivernale, les alizés de l’hémisphère sud qui sont chargés en vapeur d’eau au dessus du golfe de Guinée pénètrent sur le continent ouest-Africain loin vers le nord en prenant une composante de sud-ouest sous l’effet de la force de Coriolis. (S. Janicot et B. Fontaine. 1993). L’air chargé en humidité se propage ainsi de l’océan au continent, permettant l’arrivée des pluies sur l’Afrique de l’ouest, c’est le moment de plein développement de la mousson.
Encadré 1: La mousson résulte d’un déséquilibre énergétique entre le continent au nord et l’océan au sud. La température de l’océan, de part son inertie thermique (sa capacité calorifique), varie moins que celle du continent. En été, le continent devient alors plus chaud que l’océan. Une dépression thermique de surface (une zone de basse pression, BP) se développe sur le continent. Elle s’accompagne d’un gradient de pression important entre le continent et l’océan. Une zone de plus haute pression (HP) se situe alors sur l’océan, donnant naissance à un flux de surface entre ces deux entités, le flux de mousson. L’air plus chaud au dessus du continent s’élève et se refroidit, il se forme une cellule de type Hadley orientée sud/nord comme suit :
En Afrique de l’ouest la zone correspondante à la mousson sur l’océan est le golfe de Guinée où le flux de mousson (les alizés) se charge en humidité. L’eau s’y refroidit en été notamment grâce à l’établissement d’un upwelling sur les côtes Africaines permettant un apport en eaux plus froides (par le biais des courants océaniques). Sur le Sahara, le réchauffement est dû à l’augmentation du rayonnement reçu en été boréal. Le moteur de la circulation de la mousson est donc l’inégale variation de température entre ces deux zones.
La branche ascendante de la circulation de mousson est localisée au niveau de la ZCIT (Zone de Convergence Intertropicale), aussi appelée Equateur Météorologique (EM). Elle est marquée par une ascendance d’air chaud et humide et la création de systèmes nuageux de type cumulo-nimbus. C’est une zone de concentration de la vapeur d’eau, advectée par les alizés et les circulations de mousson dans les basses couches. Ainsi se met en place au niveau de la ZCIT d’importantes précipitations. La migration de la mousson vers le nord s’accompagne de celle de la ZCIT et se produit selon plusieurs phases.. Durant sa migration elle apportera des pluies en premier lieu sur les côtes du Golfe de Guinée entre Avril et Juin. Au Sahel, son onset, c'est à dire son commencement se produit au moment du 'saut de mousson', le 24 Juin en moyenne (avec une déviation standard de 8 jours) (Sultan et Janicot, 2003) et dure généralement jusqu'en Septembre. La ZCIT redescend alors vers le Sud pour se diriger progressivement vers l'hémisphère Sud et ainsi suivre la marche annuelle du soleil.
La figure 1 montre plus en détail la structure de la mousson en y incorporant la circulation zonale et les principaux jet impliqués dans le transport et la variabilité des précipitations :
La confluence du flux de mousson et de l'Harmattan (vent sec engendré par les différences de pressions et de températures entre le Sahara et la mer Méditerranée) arrivant du nord est connue sous le nom de Front Inter Tropical (FIT) (Hall et Peyrillé 2006). Le flux de mousson à mesure qu'il monte vers le nord du continent s'assèche (notamment en fournissant de la vapeur d'eau au niveau de la ZCIT, vers 10°N de latitude). Au niveau du FIT se sont alors deux courant sec qui se rencontrent. Il se crée une zone d'ascension moins forte et donc moins en profondeur qu'au niveau de la ZCIT (car il manque d'humidité). Un air chaud et sec monte alors en altitude vers 20°N, il s'agit de l'air du Sahara (Saharan Air Layer, SAL). Le SAL a comme conséquence une inhibition de la convection, il est difficile pour les événements convectifs isolés de parvenir jusqu'au Sahel. C'est en revanche d'avantage le cas pour des phénomènes de méso-échelles (d'environ 150 000 km2), à savoir les Systèmes convectifs de méso-échelles SCM. Ceux-ci représentent plus de 90% des pluies au Sahel (Mathon et Laurent 2002).
L'air étant dévié vers l'est par la force de Coriolis la circulation méridienne (flux de mousson, Harmattant, circulation de Hadley) est couplée à une circulation zonale. Le Jet d'est tropical (JET) passe au dessus du continent et du Golfe de Guinée (16 km d'altitude) (Koteswaram, 1958 ; Hastenrath, 1995). Il prend naissance en altitude par le gradient de pressions et de températures entre les hauts plateaux du Tibet et l'Inde, il est alors dévié vers l'est par la force de Coriolis. A des altitudes plus basses, le Jet d'Est African (JEA) se crée lorsque l'air sec (du Sahara) rejoint l'air humide (de la côte de Guinée) (Thorncroft et Blackburn, 1999). Le JEA est le lieu de développement des ondes d'Est Africaines (AEWs : African Easterly Waves) qui contribuent à la variabilité dans le flux et la quantité des précipitations de la mousson (Hall et Peyrillé, 2006). Le JEA fournit l'énergie aux perturbations du climat et propage ces perturbations sur le continent. (Long et al., 2000).
Différents mécanismes permettent de modifier la circulation atmosphérique, il s'agit des forçages de la mousson, ceux rentrant en compte dans le transport d'humidités sont schématisés sur la figure 2 :
En Juin les températures de surfaces du Golfe de Guinée sont plus faible de 2°C (refroidissement lié à un upwelling saisonnier concomitant du réchauffement du continent en été). Le gradient thermique entre l'océan et le continent est accentué, favorisant la progression de la mousson vers le nord. Ainsi, des SST du golfe de Guinée plus élevées (faibles) permettent de réduire (augmenter) l’expansion vers le nord de la mousson. Les températures de surface de la Mer Méditerranée plus chaudes favorisent sa pénétration sur le Sahel (Peyrillé et al., 2006, et Rowell, 2003) Lorsque la Méditerranée est chaude (froide) l'Harmattan est renforcé (affaiblit) et empêche (favorise) la remontée du FIT et donc du système de mousson vers le nord du continent (Peyrillé 2006). Le changement d’insolation du printemps jusqu’en été et les aérosols permettent aussi de modifier la migration de la MAO (Peyrillé et al., 2006). Pour Janicot et Fontaine (1993), le mouvement vers le nord de la ZCIT est en effet amplifié par un important gradient méridien de pression dans les basses-couches de la troposphère, résultant de la mise en place d’une forte dépression thermique de surface au-dessus du Sahara.
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Evolution annuelle de la température sur trois ans : Température en Afrique
Position et évolution de la dépression saharienne, le heat low : Heat Low
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- Le changement climatique en région de mousson africaine : évolution des champs pluviométriques et atmosphériques dans les simulations CMIP3 et CMIP5 sous scénario A1B et rcp4.5, (1960-1999, 2031-2070)